Alors que le Président de la République appelait dimanche soir à une
nouvelle étape dans la décentralisation, « L’organisation de l’Etat et
de notre action doit profondément changer. Tout ne peut pas être décidé
si souvent à Paris », le décret d’application de la loi, s’apprête-t-il à
faire de la gouvernance du sport une exception ?
On peut s’interroger
En effet le gouvernement a envoyé le 4 juin au Conseil d’Etat le « décret Bleui » relatif aux conférences régionales du sport et aux conférences des financeurs du sport et celui relatif au délégué territorial de l’Agence nationale du sport. Décret qui va à l’encontre de donner plus de « libertés et de nouvelles initiatives et responsabilités à ceux qui agissent au plus près de nos vies » comme l’a indiqué le Président lors de son allocution télévisée.Quid de la mission Dirx et Doussot ?
Le Premier ministre a confié à Benjamin Dirx, député, et Patrick Doussot, vice-président de l’office de tourisme du Touquet, une mission relative à la mise en œuvre de la nouvelle organisation territoriale du sport. Cette mission doit s’achever début juillet. Il est rapporté par les territoires que les 2 missionnaires ont conduit de très nombreux entretiens.Toutes les régions ont été auditionnées mais également, le mouvement sportif, des associations professionnelles, des représentants de fédérations de collectivités territoriales, etc… Un vrai travail de concertation salué par les acteurs du sport qui mettrait en évidence, dans de nombreux cas, une méconnaissance approfondie des textes due à une insuffisance d’informations voire, pour ceux qui se sont intéressés au sujet, un risque certain d’inapplication si le projet de décret (connu depuis mi-mars) était publié en l’état.
Mais, le décret envoyé au Conseil d’Etat ne devrait-il pas tenir compte de la concertation en cours menée par Messieurs Dirx et Doussot ? C’est ce qu’ont compris les personnes auditionnées à la lecture de la lettre de mission qui leur a été adressée afin que la rédaction du décret tienne compte des propositions de cette concertation…
Pourquoi ça coince ?
« On a le sentiment que l’Etat veut compenser le fait qu’il n’a pas la majorité au sein de l’agence sur les décisions relatives au financement des actions liées au développement de la pratique sportive » énonce un fin connaisseur du dossier.Explication de texte...
1 – La conférence régionale du sport (dont le secrétariat est assuré par les services de l’Etat ) élabore un projet sportif territorial qui couvre la quasi totalité des politiques sportives territoriales (Article L112-14 du code du sport : le développement du sport pour toutes et tous ; le haut niveau ; le sport professionnel ; la construction et l'entretien d'équipements sportifs structurants ; la réduction des inégalités d'accès aux activités physiques et sportives ; le développement des activités physiques et sportives adaptées aux personnes en situation de handicap ; la prévention de et la lutte contre toutes formes de violences et de discrimination ; promotion de l'engagement et du bénévolat la quasi totalité des politiques sportives territoriales).
2 – Ce projet sportif donne lieu à la conclusion de contrats pluriannuels d'orientation et de financement qui précisent les actions que les membres des conférences des financeurs du sport s'engagent à conduire.
3 – La ou les conférences des financeurs (projet de décret) votent à la majorité absolue des voix de membres présents :
- les seuils de financement à partir desquels les projets d’investissement et les projets de fonctionnement doivent lui / leur être soumis pour examen et avis ;
- et émettent un avis relatif à la conformité de chaque projet soumis aux orientations définies par le projet sportif territorial.
Or les collectivités sont minoritaires au sein de la conférence des financeurs qui comprend 4 collèges : l’Etat (7 membres), les collectivités (dont le nombre de représentants dépend du périmètre géographique de création de la conférences des financeurs), le mouvement sportif (6 membres), les organisations professionnelles et le monde économique (6 membres).
Outre le fait que la conférence des financeurs comprend plus de non-financeurs que de financeurs, que les financements sont très largement apportés par les collectivités territoriales, que certains membres de la conférence des financeurs seront systématiquement en conflit d’intérêt, dès l’instant qu’une collectivité souhaitera soutenir un projet prévu par le projet sportif territorial, elle devra obtenir l’avis conforme de la / des conférence(s) des financeurs.
CQFD : l’Etat finance l’agence au niveau national mais n’est pas majoritaire dans les décisions tout comme les collectivités financent le sport sur les territoires mais ne sont pas majoritaires au sein de la conférence des financeurs !
Ubuesque selon les personnes qui ont pris le temps de lire les textes ! Pas sûr que ce décret soit une bonne entrée en matière pour lancer la fin du quinquennat dans le sport et réponde aux demandes de tous d’augmenter la pratique sportive à tous les niveaux notamment à l’égard des pratiquants non licenciés.
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