Le rapport de la cour des comptes intitulé « Sport pour tous et
sport de haut niveau : pour une réorientation de l'action de l'Etat »
publié le 17 janvier est sans concession. Finalement il n'y a aucun
point positif à retenir de l'intervention de l'Etat dans le domaine du
sport.
Le constat est dur mais juste selon V Fourneyron.
Des carences de pilotage
Pas
d'évaluation, pas de compte satellite du sport, pas de mesure de
l'impact de la pratique sportive sur la santé, sur l'employabilité, sur
la cohésion sociale, indicateurs imparfaits. Saupoudrage ,
dissémination des subventions, manque de cohérence, manque de
coordination des dispositifs, pas de coordination entre les ministères,
utilité des subventions loin d'être prouvée,... A lire le rapport rien
ne fonctionne dans la gouvernance du sport.
Aucun point positif
Qu'il s'agisse du CNDS
dont le rapport pointe que « L'évaluation de l'efficacité de ces
subventions est inévitablement très limitée, en raison du nombre élevé
de versements et de bénéficiaires. Leur utilité est de ce fait même
loin d'être prouvée ». Les subventions aux équipements ne sont pas
mieux loties « la direction des sports et le centre national pour le
développement du sport ne sont pas en mesure de démontrer l'existence
ou non d'effets de levier des subventions du centre sur la construction
d'équipement sportifs ».
Qu'il s'agisse du sport pour tous
pourtant considéré comme le fondement de l'intervention de l'Etat avec
le sport de haut niveau, dont le rapport souligne que qu' »il est
essentiellement porté par les clubs et les fédérations » et est «
Fragilisé
» en raison d'un mouvement sportif qui « ne rassemble finalement
qu'une minorité des pratiquants, et ses effectifs licenciés comme ses
dirigeants ne reflètent pas la diversité de la population française ».
La politique de l'Etat en faveur du sport pour tous passant
principalement selon la cour par le soutien aux fédérations.
Qu'il s'agisse du sport scolaire et universitaire
« qui apparaît aujourd'hui en marge de la politique de développement
du sport, notamment du fait de sa forte distanciation avec les
fédérations sportives. » pire « Les objectifs de l'éducation physique
et sportive, en tant que discipline d'enseignement, ne sont pas
assortis d'indicateurs
permettant d'évaluer l'efficacité et l'efficience des moyens financiers accordés par l'État. »
Qu'il s'agisse du haut niveau dont
la commission nationale n'a plus tenu de séance plénière depuis le 23
novembre 2007, dont le fameux double projet ne fait l'objet d'aucun
dispositif national de suivi, dont le rapport considère qu'il faut
donner plus de cohérence à l'utilisation des moyens consacrés, qu'il
faut lutter contre le saupoudrage en resserrant les disciplines. Tout
juste la cour concède que « Les résultats sur la scène internationale
paraissent encourageants au regard des indicateurs reconnus, mais ils
restent fragiles" mais enfonce le modèle en comparant le haut UK sport
le modèle anglais doté de 100 M€ alors que la France dispose d'un
budget prés de trois fois supérieur pour environ trois fois moins de
médailles d'or.
Qu'il s'agisse des relations entre l'Etat et les fédérations
dont le rapport souligne que « Ni le montant de ces subventions, ni le
nombre de conseillers techniques sportifs placés auprès des fédérations
ne semblent fondés sur des critères répondant à une stratégie claire
».
Qu'il s'agisse des conseillers sportifs dont «
la position déroge à celles reconnues par le statut général de la
fonction publique » qui « cumulent pour les mêmes fonctions une
rémunération publique et une rémunération privée, sans que cette
dernière soit encadrée, si bien que, lorsqu'il est particulièrement
important, le complément de rémunération est susceptible de remettre en
cause le lien de subordination hiérarchique entre l'État et l'agent ».
Au
final rien ne trouve grâce aux yeux de la cour des comptes. On aurait
aimé que la cour se penche aussi sur le système de formation (cf notre
édito Formation aux métiers du sport : indignons nous ! ).
Un constat sans recul et sans mise en perspective.
Si
on partage certains constats on est toutefois interrogatif par exemple
sur l'affirmation de la cour quant à l'absence d'impact des
subventions sur les équipements sportifs. Comment peut on d'un coté
constater que la pratique sportive ne se limite pas aux seuls licenciés
(et réclamer une analyse plus fine des pratiquants) et de l'autre
mesurer l'impact des subventions sur les équipements aux seuls nombres
de licenciés ?
Comment peut on également examiner le sport pour
tous par le seul prisme de l'Etat. Certes il s'agit d'un parti pris
mais très parcellaire.
On aurait aimé surtout une prise de recul historique par rapport au modèle sportif.
Nous considérons que notre modèle actuel est en fin de vie.
Le
premier des années d'après guerre aux années 70 a permis au sport de
se développer essentiellement sur une logique de compétition et
d'éducation avec une forte intervention de l'Etat, du mouvement sportif
et le soutien des communes.
Le second des années 70 à la
fin de la première décennie du 21ème siècle les pratiques sportives se
sont largement démocratisées, le nombre de licencié a été multiplié par
3. Au-delà du nombre de pratiquants, c'est toute l'organisation du
sport en France qui a été modifiée. L'invention de nouvelles pratiques
physiques et sportives, la libéralisation du paysage audiovisuel
français et son corolaire la professionnalisation des sportifs et des
structures ont été de nature à favoriser l'implantation d'acteurs
privés dans ce qu'il convient d'appeler la gouvernance du sport. Les
premières lois de décentralisation, le renforcement de
l'intercommunalité ont facilité l'intervention des collectivités à tous
les échelons. L'Etat a largement accompagné cette mutation.
C'est
à la fin de ce modèle que nous assistons, et l'histoire retiendra que
le rapport de la cour des comptes a signifié son arrêt de mort
précipité par l'obligation de réduire la dette publique !
Dans ce
contexte les propositions de la cour pourraient paraître anecdotiques
tellement le rapport remet en cause le modèle et ne propose pas une
vision complète d'une nouvelle gouvernance.
La question est bien là :
-
faut il améliorer le modèle comme le suggère la cour qui propose de
réformer le CNDS, positionner l'INSEP comme pivot opérationnel du Haut
niveau et responsabiliser les fédérations sportives pour qu'elle
gagnent en autonomie
- ou faut-il réfléchir à un autre modèle,
le troisième qui ne peut s'envisager qu'avec tous les autres acteurs du
sport et à tous les niveaux de son organisation. Dommage que la cour
ne se soit pas inscrite dans cette perspective.
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